Une approche qui se vit,
plus qu'elle ne se dit ...
La Gestalt-thérapie, à découvrir ici au travers de textes immersifs.
Une tentative d'aller au plus proche.
Pause. Revenir à soi, dans le moment présent.
Patient : J’arrive à ma séance de thérapie avec l’envie de raconter tout ce que je vis, les évènements, mes conclusions, mes inquiétudes, mon besoin de solutions… Souvent je me rue ainsi dans un partage qui se veut exhaustif, avec cette hâte d’être comme qui dirait “délivré.e”. Thérapeute : J’accueille ton empressement, j’imagine l’inconfort de ce que tu vis et ton besoin de mieux-être. Je t’invite à faire une pause. Cette pause tellement précieuse en Gestalt-thérapie qui permet de revenir à soi et de sentir ce qui est là vivant. Patient : Ce n’est pas facile au début, je ne comprends pas bien cette proposition. Mais petit à petit je l’apprivoise, j’apprends à donner le temps et l’espace pour me poser en moi et sentir. Je me sens effectivement pressé.e, compressé.e presque, mon diaphragme est noué, ma respiration est courte. Les idées fusent dans ma tête et mes membres sont comme suspendus ; je ne sens pas le sol sous mes pieds, je ne sens pas mes cuisses sous mes mains. Je ne sais pas si j’éprouve une émotion… Peut-être que j’ai peur. - - - Et notre séance thérapeutique prend son envol. Quand nous nous ouvrons ainsi à l’expérience du moment présent, nous touchons ce qui est le plus vibrant en nous. Au cours de la séance, nous entamons un voyage avec ce qui émerge au fur et à mesure de ce processus, en approfondissant cette conscience de soi et de nos besoins. Peut-être vas-tu en effet sentir cette peur si elle est là ; peut-être vas-tu recontacter la croyance enregistrée en toi qui génère cette peur ; peut-être pourrons-nous identifier ensemble quel est ton besoin face à cette peur. Se mettre à l’écoute de ce qui vit en nous, ici et maintenant, est un outil merveilleux. Nous pouvons presque nous demander si nous sommes alors actifs ou passifs, ou les deux en même temps… Et ce moment présent porte en lui le passé, tout comme le futur imaginé, car nous sommes des êtres qui nous inscrivons dans une temporalité. Pour autant, ce n’est qu’au présent que nous sommes réellement vivants.
Gestalt-Thérapie : Passer de l'explicatif à l'expérientiel.
Comme c’est différent quand je comprends quelque chose, non pas avec la tête, mais avec tout mon être qui prend conscience. Ces moments thérapeutiques où le sens émerge, où le renouveau pointe son nez, je les goûte, je les laisse infuser dans le corps et se déposer en moi. Mais comment adviennent-ils, ces moments ? Quel chemin pouvons-nous emprunter, autre que celui de l’analyse et du mental ? Tu me parles de ton impression de ne pas être assez… Patient : À quoi rime cette routine, le travail que je fais est dénué de sens, je n’ai rien de particulier à partager avec les autres, en quoi pourrais-je les intéresser ? Thérapeute : Comment te sens-tu en disant cela ? Patient : Je me sens comme “vide”. Thérapeute : Imagine quelque chose qui est plein, quelque chose qui est riche de ce qu’il a à offrir. Patient : J’imagine un arbre resplendissant, plein de fruits mûrs qui appellent à être cueillis. Je te propose que nous nous levions pour explorer cette image avec le corps. Tu es d’accord. Tu deviens cet arbre, je te laisse sentir ces fruits qui pèsent au bout de tes doigts… Puis je t’invite à aller voir tes racines. Tu as du mal à les sentir et ton attention revient très vite vers le haut du corps. Patient : C’est comme si mes branches étaient plus importantes. Thérapeute : Qu’est-ce qui les rend si importantes ? Patient : Ce sont là que naissent les fruits, attirant toute cette vie autour de moi, les oiseaux, les insectes, les humains, ça gargouille ! Depuis cet endroit nous explorons ensemble ton besoin de contact et d’amour. Nous explorons la croyance qu’il faut que tu aies quelque chose à donner pour que les autres s’intéressent à toi. Nous explorons comment tu te désintéresses de tes racines, privilégiant ce qui est en dehors - tes branches, tes fruits, les autres - avant de nourrir ce qui est au-dedans - tes racines à toi, non visibles, intimes et tellement nécessaires à ton déploiement. Pas à pas, nous découvrons ce qui se joue en toi en suivant les chemins que nous ouvre cette expérience sensible. Des éclairages de plus en plus profonds s’offrent ainsi, dépassant les tracés habituels du mental. Et cette connaissance nouvelle, appelée “awareness” en Gestalt, s’inscrit différemment en toi, puisque c’est tout ton être qui a été engagé dans l’expérience (corps, émotions, pensées, images, comportement, appréhendés comme un tout).
Tout est Relation. Et la thérapie avant tout !
Je marque un temps d’arrêt et je viens sentir ces nœuds en moi, là où mon expérience est moins fluide, là où peut-être ça fait mal. Je peux me penser de manière isolée, comme une entité portant ses difficultés propres, ses propres nœuds à démêler… Mais je remarque que tout ce qui me traverse parle en réalité de mon rapport au monde qui m’entoure. Mon monde, fait de mon histoire, fait de tout ce qui peuple ma vie aujourd’hui, de ce à quoi j’aspire et dont je rêve. Ainsi, je me vis moi, e n r e l a t i o n . Et les nœuds de mon expérience, vécus dans ma pensée, mon corps, mes émotions, s’étendent telles des cordes s’amarrant au monde que j’expérimente au-dehors. La thérapie est rencontre. On ne vient pas soigner l’être souffrant, porteur de problèmes intrinsèques, on vient prendre soin de la relation qui prend corps entre nous. Ensemble, nous découvrons comment cette relation particulière peut être révélatrice d’un mode relationnel plus large. Imaginons par exemple que dans le monde de la personne qui consulte, “être d’accord” soit synonyme de sécurité et d'apaisement. Si à un moment donné le thérapeute choisit de se différencier (en n’allant pas dans le sens de l’autre), cela peut être vécu comme une menace, mettant à mal la qualité de la relation. S’ouvre alors une merveilleuse opportunité d’expérimenter ce qui se joue entre eux, de le sentir, de le nommer, de découvrir de quoi le patient a besoin et d’agir en fonction. La dimension relationnelle de la thérapie est mise au service de son propre cheminement. Dans cet espace sécurisé, nous pouvons aller au contact de ces mécanismes, ensemble, et leur permettre enfin de se transformer.